La loi

J'en aurais bien fait un texte mais je n'ai que quelques twits pour dire mon idée avant de retourner au champ de pierres que je dois casser toute la journée sans savoir pourquoi, alors que c'est idiot, il y en a déjà plein, des petites.

Imagine que le boulot du gars consiste à ranger des bouteilles, et en arrivant après lui, tu constates qu'il les a mises à l'envers. Tu es choqué, tu comprends pas, est-ce de la provocation ou bien, selon la stricte logique, ignore-t-il ce que sont « des bouteilles » ?

Et même en ignorant ce que sont « des bouteilles », ne paraît-il pas plus « logique » de les mettre « à l'endroit », tel que nous les nommons ? Vu que le haut semble plus fragile. On peut lui demander : Pourquoi tu as fait ça ?

Il répondra vraisemblablement qu'il n'en sait rien, qu'effectivement il ne connaît pas ces objets, n'en a jamais vu, et a estimé que c'était assez solide pour tenir dans ce sens, et selon lui, plus joli. On pourra ausculter ses raisons.

Je veux dire que « la raison » dépend de la connaissance, et qu'une connaissance commune fabrique des raisons cohérentes entre elles. La plupart du temps, sans s'en rendre compte, et sinon, on est interloqués.

Un exemple moins grossier permet d'approfondir : Cette personne ne comprend pas pourquoi il ne faut pas acheter des produits avec des emballages plastiques, qui finissent dans la nature et donc dans son estomac.

Pour elle, quand on les jette à la poubelle ils disparaissent de sa vue donc le problème est réglé. Sous la pression de sa fille elle décide d'acheter des récipients en verre, et d'y loger toutes ses denrées, après avoir bien sûr jeté tous les emballages.

Elle ne comprend pas le principe. C'est très drôle, on en rit, mais on touche à quelque chose d'essentiel : la compréhension, la conscience, la raison, le discernement. La différence entre le bien et le mal.

L'éducation. Elle consiste à enseigner aux enfants à acheter de récipients en verre pour y mettre des denrées dont on a jeté le plastique pour « enseigner » « des principes »... qu'en réalité même les enseignants ignorent.

Ils agissent par réplication, mimétisme, imprégnation, et même par le forçage si jamais il y en a qui osent poser des questions. Mais les vraies raisons restent obscures, confuses, à part simplement qu'elles sont associées à une répression brutale.

Une société plonge naturellement vers la dictature dès que les liens avec la raison ne sont plus solides et conscients, mais inculqués par la force, au point de finit par perdre le fil de cette même raison, disparue depuis longtemps.

Petit à petit les comportements, les connaissances, les notions du bien et de mal sont associées à des choses qui ne sont jamais interrogées et qui n'ont jamais leur place dans les discussions, qui seraient trop longues.

On peut par exemple définir qu'il est obligatoire d'avoir des bols en verre. Que ceux qui n'ont pas de bols en verre sont de mauvais citoyens, qu'il faut brimer et punir. Sans que personne ne sache pourquoi ils agissent ainsi.

Les gens ont juste, naturellement, culturellement, et d'une façon tellement répétée au fil des générations qu'elle est inculquée dans l'Adn, ont « confiance » en la Loi. Toute loi est stricte est imparable. C'est comme une loi elle-même.

Alors on peut créer n'importe quelle loi. On peut profiter de la crédulité des gens. On peut leur faire faire n'importe quoi, et guider leurs comportements en fonction des besoins, des avantages et du confort du législateur, qui baigne dans le luxe.

À un moment donné on a le droit d'être intelligent, c'est pourquoi je dis toujours à mes élèves, à qui j'enseigne à casser du caillou, pour que leur bagne soit efficace et le patron content, que les lois n'ont que la valeur de leur logique.

Les lois, pour être des lois, doivent être aimées, et pour être défendues elles doivent être défendables. Si on accepte une loi, on en devient le législateur, et on doit pouvoir se justifier, personnellement, et non en disant juste voix grave « c'est la loi ».

C'est à l'humain qu'il revient de tisser les liens de la raison pour que sa société soit en paix. La paix découle de la logique, et la logique associe les connaissances entre elles. Et cette loi-là, à la différence des lois libres, est inéluctable.